vendredi, novembre 18, 2005

Nous, les Asiatiques de France

Nous - les Français d’origine asiatique - avons un long chemin à parcourir ensemble désormais, car nous venons des mêmes contrées lointaines, car nous appartenons à la même communauté, celle des exilés volontaires ou involontaires qui avons transplanté nos racines dans la terre de France. La France est un pays magnifique : elle nous a tous accueillis, elle nous a donné la possibilité de travailler, d’entreprendre. La République a pourvu à l’éducation laïque de nos enfants,... elle leur a inculqué des valeurs de liberté et d’égalité auxquelles nous tenons. Nous aimons la France, et c’est pourquoi nous nous réunissons aujourd’hui.
En effet, la France est notre pays, mais nous avons deux patries : nous sommes Français, et Asiatiques en même temps, Français d’origine cambodgienne, chinoise, laotienne, vietnamienne. Nous avons en nous deux cultures, deux modes de penser, deux façons de vivre. Ce double héritage constitue notre richesse. Fusionner deux en un, surtout pas ! L’identité de la France est multiple, elle est plurielle, elle est diversité. C’est une chance pour notre pays, qui doit savoir la saisir.

Nous nous trouvons aujourd’hui à la croisée des chemins. La société française est en train de changer. Une certaine prise de conscience commence à s’imposer. Des fenêtres s’ouvrent, des opportunités se présentent qui étaient quasiment impensables il y a peu.

Et la communauté asiatique aussi est en train de se métamorphoser : elle entre dans une nouvelle phase de son histoire, la phase de la « vraie vie », après celle de la « survie ». Pendant longtemps, nos parents et nous-mêmes avons dû travailler pour simplement survivre, pour donner à manger aux enfants, pour avoir un toit. Généralement, nous sommes durs à la besogne, nous ne ménageons pas notre peine, nous sommes ingénieux et inventifs, alors il est normal que nous réussissions dans nos domaines respectifs. Nous avons amplement prouvé que nous savions, parfois même mieux que les autres, créer de la richesse, et contribuer à la prospérité du pays. Nous connaissons la réussite économique et financière, mais nous sommes plus qu’une force économique, nous sommes des Français qui veulent vivre pleinement leurs citoyennetés.

Notre civilisation nous a donné un passé, la République nous offre un avenir.

lundi, novembre 14, 2005

On ne peut pas faire table rase de son passé..

Depuis plusieurs jours, mes amis résidant hors de France m’appellent, affolés, pour demander de mes nouvelles : ma voiture a-t-elle été épargnée par les émeutiers ? Ai-je pu sortir de chez moi et aller au bureau ? Le ravitaillement est-il assuré dans le quartier ? Rien d’étonnant à cela, tant les médias étrangers ont donné des événements des dernières semaines une image excessivement dramatique !
La situation est grave, certes, mais il faut raison garder : l’embrasement des banlieues manifeste l'échec des politiques de la ville et de l’immigration menées depuis vingt ans par les gouvernements successifs, de droite comme de gauche. Mais s’agit-il pour autant, comme le claironnent complaisamment certains démagogues, de la mort annoncée du modèle d’intégration à la française ? Je ne le crois pas, bien au contraire !
En tant que pur produit de l’école de la République, je peux témoigner que ce modèle demeure toujours valable et plus nécessaire que jamais. Bien sûr, si le modèle est bon dans son principe (refus du communautarisme), il faut lui donner les moyens de fonctionner, de s’adapter aux changements du monde d’aujourd’hui. Ce qui n’a pas toujours été fait…
Voilà ma conviction : c’est en m’appuyant, en même temps, sur ma culture d’origine et sur les principes de la République que je peux construire un avenir citoyen. Originaire de la communauté chinoise du Cambodge, j’ai grandi dans un environnement nourri par une double culture : la chinoise transmise par mes parents et la française enseignée par l’école laïque. Je suis fier de l’héritage de mes parents, constitué par la langue, l’histoire, les valeurs, les figures morales de cette grande civilisation qu’est la Chine. Je suis reconnaissant à la France de nous avoir accueillis, en nous donnant la possibilité, sur la base de l’égalité et de la liberté, d’entreprendre et de nous épanouir. Nous sommes tous différents mais cette diversité que nous apportons au banquet républicain permet justement la richesse du festin.
L’intégration de la communauté d’origine asiatique peut nous servir d’inspiration pour comprendre le désarroi des autres communautés face à ce qu’elles considèrent comme l’indifférence ou le mépris de la République. On ne peut pas faire table rase de son passé, or la France, peut-être parce qu’elle n’a pas fini de digérer sa décolonisation, a souvent négligé de donner à la culture d’origine des populations immigrées la juste place qui lui revient. Il faut donc faire en sorte que chacun soit fier de son passé, de la culture de ses parents, afin de pouvoir apprécier vraiment ce que nous apporte la République.

La France est une terre fertile, à nous de la cultiver !

jeudi, novembre 10, 2005

Redonnons de la centralité à tous les citoyens

Si des centaines de milliers d’emplois demeurent inoccupés dans le domaine des services à la personne, c’est qu’ils ne paraissent guère attrayants (ni bien rémunérés, ni glamour !). Comment inciter les jeunes à aller vers eux ? En leur montrant qu’ils accompliraient alors un acte citoyen, dans la mesure où ils rendent service à la société : leur travail crée de la valeur, enrichit la collectivité. Celle-ci, en retour, doit trouver une façon de manifester sa reconnaissance, même si elle n’a pas la capacité de mieux les rémunérer : en donnant une gratification sous la forme d’une valorisation symbolique.
Redonner « sens » au travail, explorer toutes les pistes permettant de redonner un « sens » au travail, de faire prendre conscience que le travail est le moteur de l’accomplissement de soi, autant que celui des relations sociales et des échanges.
Pour être efficace, cette refondation du sens pourra s’effectuer sur trois plans essentiels que psychologues et sociologues connaissent bien, et qui couvrent l’ensemble de l’identité humaine : le réel (champ de la matière, réalité de l’espace et du temps), l’imaginaire (champ de la représentation, projection et identification) et le symbolique (champ du langage et de la loi).
Elle prendra en compte toutes les catégories de citoyens dont le rapport au travail apparaît comme difficile ou conflictuel : les jeunes arrivant pour la première fois sur le marché de l’emploi ; les chômeurs, récents ou de longue durée ; les travailleurs précaires, dont l’emploi est peu satisfaisant ou insuffisant à assurer une vie digne ; les seniors, dont les compétences pourraient être mieux mises à profit pour la collectivité.
La valorisation de soi repose sur la reconnaissance de son propre rôle social par la collectivité. Il faudra un système de reconnaissance comportant une identité visuelle forte venant s’ajouter au système traditionnel de rémunération. Refonder le sens du travail signifie retrouver la confiance en soi, redonner la capacité de prendre des initiatives constructives et de s’ouvrir sur le monde d’aujourd’hui.
Une telle entreprise semble primordiale, car elle conditionne tout simplement notre capacité à construire la cité prospère de demain.

mardi, novembre 08, 2005

Le travail donne sens à l'existence

C’est dans un tel cadre que la réflexion sur le travail peut aboutir : le travail ne peut se réduire à l’ensemble de ces tâches pénibles, répétitives, absurdes, qui nous fournissent de quoi (sur)vivre. Le travail est valorisant, parce qu’il me fait « homme ». Pour forger son identité, l’homme a besoin de s’imaginer, de se projeter, et de s’accomplir.
Le travail est ce qui permet d’accomplir ce projet de soi ! Je suis ce que je réalise. On ne le répétera jamais assez, notre République est une « méritocratie », et nous en sommes fiers. Cela signifie que chez nous, il n’y a de noblesse que par l’effort et le travail, et non par la naissance ou la richesse. Nous n’existons que par ce que nous faisons. Nous ne sommes valorisés ni par notre nom ni par notre fortune, mais bien par nos réalisations.

Voilà donc la voie à creuser : faire comprendre qu’il y a une véritable réalisation de soi dans le travail, et faire en sorte qu’il y ait une vraie reconnaissance du travail réalisé. Des jeunes heureux de travailler. Celui qui travaille et se réalise ainsi apparaît comme un modèle social, un personnage idéal auquel on a envie de s’identifier.
C’est particulièrement valable pour les jeunes, dont il faut transformer le rapport au travail et susciter le désir de travailler.

lundi, novembre 07, 2005

Redonner sens au travail

Le gouvernement s’est engagé à gagner la « bataille de l’emploi », c’est en effet la priorité des priorités, pour laquelle toutes les énergies du pays doivent être mobilisées.
Cependant, la plupart des mesures proposées jusqu’ici, et notamment les différents types de « contrats » mis en place, n’exercent qu’une action marginale sur le chômage, car elles n’en traitent que les effets (pourquoi ne travaille-t-on pas, ou pourquoi ne peut-on pas travailler), et rarement les causes (pourquoi ne veut-on pas travailler).

Il est donc nécessaire d’entreprendre une véritable révolution copernicienne, c’est-à-dire un bouleversement radical dans la façon de considérer le problème, en adoptant une perspective nouvelle : celle du travail en tant que fondateur du sens, seule susceptible de redonner souffle et vitalité à une société en panne de repères et d’aspirations.
De fait, notre société dans son ensemble apparaît démoralisée et divisée. Or, la cohésion sociale constitue le principe de base de toute volonté publique. Pour être efficace, l’action politique doit s’appuyer sur des valeurs, c’est-à-dire le socle sur lequel on bâtit la société d’aujourd’hui et de demain. Quelles sont les valeurs de la France du XXIème siècle ? Quel est le projet de société qui fait vibrer tous les Français et qui leur donne envie d’avancer ?
La réponse est certainement à chercher du côté d’idées exaltantes comme la justice, la solidarité, la conviction que nous partageons quelque chose qui donne sens à notre vie.

dimanche, novembre 06, 2005

samedi, novembre 05, 2005

Quand j'étais plus jeune

Quand j’étais plus jeune, l’Antiquité grecque me fascinait et j’aimais beaucoup lire les histoires tirées de la mythologie ou d’Homère.
Celle-ci se passe au IIIème siècle av. J.-C. :
l’armée du général romain Marcellus assiège la ville de Syracuse, en Sicile, qui résiste longtemps grâce aux machines de guerre (catapultes, grues) inventées par le grand savant Archimède (mais oui, celui-là même qui s’était précipité hors de son bain et avait couru, tout nu, dans les rues, en s’écriant : « Eurêka ! Eurêka ! »...). Il y avait surtout ce miroir parabolique qui permettait de concentrer les rayons du soleil et d’incendier les navires romains au loin. C’était un peu comme une sorte de rayon laser avant l’heure, une anticipation des combats entre vaisseaux intergalactiques de la Guerre des Étoiles. Bien sûr, on se disait que ce n’était sans doute pas possible, technologiquement parlant, car l’idée semblait trop belle et relevait davantage du produit de l’imagination des conteurs ou des poètes, mais cela me faisait rêver en tout cas.

Or, un groupe d’étudiants du fameux Massachusetts Institut of Technology (MIT), sous la conduite du professeur David Wallace, ont prouvé, le 4 octobre dernier, que c’était parfaitement possible : sur le toit d’un garage du MIT, ils ont disposé 127 miroirs tout simples devant la maquette grandeur nature d’une proue de navire et, en dix minutes, ont réussi à l’enflammer !
Pourquoi cette nouvelle m’a-t-elle frappé, et même enthousiasmé ? C’est parce qu’elle a provoqué en moi l’exaltation qu’on ressent quand un rêve d’enfance devient réalité. Nous sommes tous habités par d’innombrables songes, utopies, fantaisies, qui, à leur manière, donnent sens et direction à notre vie. Il serait bien sûr déraisonnable de s’en contenter, mais il faut apprendre à la valoriser : ce sont des moteurs qui nous poussent à agir.
Et je demeure persuadé que l’utopie devient réalité par l’action…

vendredi, novembre 04, 2005